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6 mars 2016
Le dernier ouvrage de Rajiva Wijesinha, « Triomphe et désastre : les années Rajapakska » est un remarquable document sur les premières années au pouvoir de Rajapakska qui constituèrent un tournant de l’histoire récente du Sri Lanka.
L’ouvrage célèbre la victoire sur la terreur du LTTE des tigres tamouls, qui avait imprégné tous les aspects de la vie des Sri Lankais au cours du dernier quart de siècle. Il donne un aperçu exceptionnel du travail d’une institution de l’état qui a joué un rôle central, même lorsqu’il a dû s’adapter aux circonstances lorsque le LTTE des tigres tamouls a imposé un changement radical de tactiques, en déplaçant le terrain de confrontation de la table des négociations à un champ de bataille féroce où les civils furent transformés en chair à canon.
C’est un récit personnel de grande qualité des événements tels qu’ils se déroulèrent de juin 2007, quand Rajiva Wijesinha fut nommé secrétaire général au secrétariat chargé de la coordination des pourparlers de paix et la fin de la guerre en mai 2009. En juin 2008, il fut aussi chargé du secrétariat au ministère des droits humains et de la gestion des catastrophes et son récit se trouve ainsi enrichi des expériences vécues au fil de cette période.
En dehors du caractère fascinant du texte et de sa description colorée et vivante des caractères et des situations, des intrigues et des duplicités étayées par une abondante documentation, j’ai trouvé dans cet ouvrage les pièces du puzzle qui manquaient à l’image que je m’étais faite de ce morceau d’histoire à partir du confortable point de vue dont je bénéficiais à Genève.
Quand je dis Genève, je n’évoque pas seulement l’année passée en tant que représentant permanent du Sri Lanka auprès des Nations-Unies, mais bien la part la plus importante de ma vie passée à Genève à étudier et travailler autour et alentour du système des Nation-Unies. Plus de dix années furent ainsi consacrées au service du Haut-Commissariat aux Droits de l’Homme. J’ai vu et vécu ce fonctionnement sous de nombreux angles : en tant qu’étudiant à l’Institut des Etudes Internationales à Genève qui formait les agents à ces fonctions, plus tard comme employée internationale et, plus récemment, comme représentante d’un état membre.
A l’inverse des LTTE (Tigres Tamouls) hier, le lobby séparatiste d’aujourd’hui et ses soutiens occidentaux, la principale cause d’échec des gouvernements sri lankais successifs résulte d’une sous-estimation des dimensions internationales de ce conflit local. A mon avis, c’est cette appréhension de la situation qui a permis au LTTE alors et au lobby séparatiste aujourd’hui, de monopoliser l’attention à l’international, le tout facilité par l’absence du gouvernement à ce niveau. Mes commentaires porteront dès lors essentiellement sur les chapitres de l’ouvrage qui traitent de cet aspect des choses.
Intervention internationale : le livre de Rajiva Wijesinha ne parle guère des opérations militaires mais plutôt d’un aspect de cette guerre moins spectaculaire mais sans doute plus important et plus dangereux car plus insidieux. Ce que Rajiva Wijesinha appelle « La bataille qu’il fallait mener pour empêcher le gouvernement d’entrer en fonction suite aux interventions internationales ». Cette bataille n’est pas encore terminée. C’est pourquoi ce livre doit être lu par tous ceux qui s’intéressent à l’installation d’une paix durable.
Le récit de Rajiva Wijesinha corrobore la thèse soutenant l’idée que derrière les initiatives de Genève, il y a d’autres motivations que la défense des droits humains de la communauté Tamoule. Il démontre avec de nombreux exemples, documents et extraits de presse communiqués par le Secrétariat à la paix à l’appui, à quel point les gouvernements occidentaux, les groupes d’action nationaux et internationaux créés par leurs soins et les Nations-Unies, se sont abstenus de condamner les crimes, enlèvements et recours aux enfants soldats par le LTTE. Il montre comment, bien au contraire, en dépit d’informations de première main sur leur caractère totalitaire et leurs abus en tous genres, le LTTE a bénéficié, directement et indirectement, de leur aide.
L’œuvre de Rajiva Wijesinha établit clairement que l’intervention extérieure visant à torpiller la souveraineté du Sri Lanka et le cours de son histoire n’a pas commencé pendant la dernière phase de la guerre bien que la campagne menée par l’occident se soit focalisée sur cette période. L’intervention occidentale avait commencé bien avant cela, en s’adaptant aux circonstances mais en gardant soigneusement en vue un objectif bien précis.
Priorité au soutien à LTTE et au lobby interventionniste : au début, ils tentèrent d’asseoir leur influence par le biais de leur aide au LTTE. La présence de gouvernements UNP pro-occidentaux sous la présidence de CBK les rassurait aussi. Le livre de Rajiva Wijesinha fourmille de faits et de récits illustrant les relations de soutien mutuel existant en particulier entre le régime -CBK - Ranil Wickermasinghe- , le LTTE, les occidentaux, les départements des Nations-Unies et des ONG nationales et internationales interventionnistes.
A cette époque, des millions de roupies de fonds étrangers ont servi au financement du LTTE avec l’accord du gouvernement de Rani Wickermasinghe, même après que le LTTE ait fait clairement savoir qu’il ne participerait pas aux négociations. Le financement du conglomérat des interventionnistes de même tendance, comme Rajiva Wijesinha décrit ces ONG, s’est poursuivi massivement pendant les années Rajapaksa quand ce « financement pour la paix » s’est reconverti en « critiques du gouvernement », ce qui est aussi le titre du chapitre 6 de l’ouvrage.
Plusieurs chapitres du livre de Rajiva Wijesinha sont consacrés à des faits, des tableaux, des noms d’organisations et de personnes concernées par des transferts de montants qui tournent autour de plus de deux cent millions de roupies d’aide financière étrangère.
Apparition de la notion de Responsabilité de Protéger (R to P) ou « Droit d’ingérence » encadrant le gouvernement Rajapaksa : dans la période suivant immédiatement l’élection de Rajapaksa à la présidence, l’opposition au Sri Lanka aussi bien que les gouvernements occidentaux ont eu tendance à sous-estimer l’homme. En 2007, ils prévoyaient toujours que son gouvernement serait renversé et que les pressions internationales en viendraient à bout.
Ce sentiment a bien entendu évolué, notamment avec la défaite du LTTE dans la province de l’Est en juillet 2007. Il devint de plus en plus évident que le LTTE pourrait bien, après tout, ne pas sortir vainqueur de l’option militaire qu’il avait lui-même choisie.
Rajiva Wijesinha nous raconte comment, au fil de cette période, la campagne anti-gouvernementale a grandi en force et virulence et à quel point les ONG interventionnistes, Human Rights Watch en particulier, ont lancé des attaques concertées contre le gouvernement sans que celui-ci juge opportun de les contrer.
Il montre aussi à quel point cela coïncidait avec la préparation de la session de septembre 2007 du Conseil des droits de l’Homme au cours de laquelle les britanniques avaient eu l’intention de faire passer une motion qu’ils avaient déjà rédigée en 2006. Il y a eu trois tentatives de cette sorte en 2006, 2007 et mars 2009 afin de faire passer une résolution contre le Sri Lanka avec l’appui de la Grande-Bretagne, ancienne puissance coloniale.
Il convient d’ailleurs de rappeler que de nombreux hauts responsables de Human Rights Watch sont issus du State Department et du National Endowment for Democracy. Le Comité Consultatif de sa division des Amériques a même le soutien d’un responsable officiel de la CIA nommé Miguel Diaz.
Il est très vraisemblable que la perspective d’une défaite totale du LTTE et le renforcement du gouvernement Rajapaksa à Colombo ont incité Washington à se tourner vers la possibilité d’élaborer un projet de R to P ou « droit d’ingérence » contre le Sri Lanka comme moyen de restreindre la souveraineté de l’état et de légitimer une éventuelle intervention militaire pro active et préventive à une date ultérieure. Dans un autre pays, Washington aurait pu intervenir directement sous prétexte de combattre le terrorisme.
L’administration Obama, tout comme l’administration Bush avant elle, restait sous l’influence des néoconservateurs qui plaidaient en faveur d’interventions unilatérales pour combattre ce qu’ils appelaient les « menaces globales », en ce compris le terrorisme.
Ronald Rumsfeld, ancien secrétaire à la défense, décrivait ces nouvelles menaces comme « inconnues inconnues » ou encore « ces choses dont nous ignorons que nous ne savons rien » et qui parce qu’elles sont invisibles, justifient le recours à la force, unilatéralement, pro activement, préventivement, en tous lieux et à tout moment.
Même en l’absence de preuves puisque, selon Rumsfeld, l’absence de preuves n’est pas la preuve de leur absence. Pour des motifs évidents, Washington ne pouvait d’ailleurs pas prétendre que le Sri Lanka était incapable ou peu désireux de combattre le terrorisme.
Rajiva Wijesinha livre un compte rendu fascinant vu de l’intérieur des premières manifestations du « R to P » ou Droit d’Ingérence, et sur comment le Sri Lanka a été encadré avec l’appui des ONG du conglomérat interventionniste qui a été construit avec l’aide des fonds étrangers sous les régimes précédents.
De manière non surprenante, le concept de droit d’ingérence avait été avancé à un moment où le LTTE essuyait une défaite à l’Est comme en juillet 2007 et par un pionnier du concept qui n’était autre que l’ancien ministre des affaires étrangères australien Gareth Evans.
Evans avait été l’invité du Centre International des Etudes Ethniques pour y donner la conférence du « Neelan Tiruchelvam Memorial » intitulée : « Les limites de la souveraineté nationale : la responsabilité de protéger au 21° siècle ». A cette époque, Evans était président et CEO de « L’international Crisis Group » et co-président du « Global Center for the Responsibility to Protect ».
Rajiva Wijesinha révèle l’existence d’une véritable conspiration d’un groupe étroitement soudé, composé du sous-secrétaire général des Nations-Unies, Radhika Coomaraswamy, du directeur exécutif de l’ICES, Rama Mani, à qui était promis un énorme montant de financements étrangers, de Gareth Evans du Centre Global pour la Responsabilité de Protéger ainsi que d’Angela Bogdan, à l’époque Haute Commissaire canadienne.
Des allégations furent alors échafaudées pour pouvoir accuser l’état de génocide, nettoyage ethnique, crimes de guerre, crimes contre l’humanité ou toute autre forme de crimes de masse.
Ainsi commença petit à petit le montage d’un dossier qui aboutit au fameux rapport Darusman puis dans les rapports du Haut-Commissaire des Nations-Unies aux droits de l’homme. Qu’il y ait eu une stratégie pour épingler le Sri Lanka devint évident des années plus tard en 2013, quand le Sri Lanka fut retenu comme un des six pays susceptibles d’être retenus pour la mise en application de la R to P ( Droit d’Ingérence ) par le groupe de travail US sur « The United States and R to P : des paroles à l’action » qui était co-présidé par l’ancienne secrétaire d’état US, Madeleine Albright et l’envoyé spécial du président US au Soudan, Richard Williamson. Gareth Evans participait aussi à ce groupe.
Juillet 2007– entre en scène le Haut-Commissaire des Nations-Unies aux droits de l’homme : c’est dans ce contexte politique et militaire qui caractérisait la mi-2007 que le Haut-Commissaire aux Droits de l’Homme des Nations-Unies, Louise Arbour à l’époque, rendit également visite au pays. Elle arriva en juillet 2007, accompagnée par Rory Mungoven. Rajiva Wijesinha décrit avec beaucoup de détails le rôle insidieux joué par Rory Mungoven, connu comme interventionniste et devenu une constante dans les affaires du Sri Lanka depuis son affectation comme conseiller des Nations-Unies aux Droits de l’Homme suite à l’accord de cesser le feu (CFA) en 2002.
Avant de rejoindre l’OHCHR, Mungoven avait été directeur de la communication à Human Rights Watch et chef du programme Asie-Pacifique d’Amnesty International. Il revint avec Louise Arbour pour défendre la mise sur pied d’une mission de surveillance sous la forme d’un bureau de campagne qui s’était discrédité en tant qu’instrument d’intervention occidentale. Mungoven revint encore récemment accompagné du tout nouveau Haut -Commissaire, Zeid Ra’ad Al Hussein, pour discuter de la mise en application de la résolution controversée 2015 du Conseil des Droits de l’Homme. Dans le dernier numéro du 8 février de « The Island », j’ai écrit au sujet du rôle insidieux que jouait et continuait à jouer le OHCHR.
Défaite du LTTE : répercussions des changements sur le champ de bataille à Genève : On aurait pu s’attendre à un reflux de ces positions virulentes lorsque le pouvoir au Sri Lanka parvint à venir à bout d’une puissante structure terroriste, seul et sans aucune assistance extérieure. N’importe où ailleurs, un tel succès aurait été applaudi par les mêmes pouvoirs occidentaux ; après tout, combattre le terrorisme était devenu leur nouveau cri de ralliement.
Mais cela ne s’est pas produit et la malveillance resurgit avec un désir de vengeance en plus. Les occidentaux tentèrent en mai 2009 de mettre sur pied une session spéciale pour empêcher une victoire totale sur le LTTE mais ne parvinrent pas à mobiliser tous les soutiens dont ils avaient besoin. Rajiva Wijesinha rappelle à quel point les occidentaux envisagèrent alors sérieusement la mise sur pied d’un Tribunal pour Crimes de Guerre.
Les occidentaux parvinrent néanmoins à obtenir la convocation de la session spéciale qu’ils souhaitaient quelques jours après la fin de cette guerre mais elle ne put se réunir. Rajiva Wijesinha explique comment la stratégie adoptée par le tout nouveau représentant permanent à l’ONU, Dayan Jayatilleke, s’avéra efficace pour isoler l’adversaire.
Cette victoire a montré l’absolue nécessité d’élaborer des moyens de défense solides pour parvenir à contrer les attaques. Si la mission en poste à Genève était restée passive, l’échec aurait été au rendez-vous par le biais d’une résolution déjà préparée par la Grande Bretagne. La stratégie de Dayan consista à empêcher par tous les moyens la prise en considération du projet de résolution et la seule façon de procéder consistait à refuser de débattre de ce texte et de persuader un nombre suffisant de membres de faire savoir qu’ils refuseraient toute tentative de placer le Sri Lanka à l’agenda de la réunion.
Rajiva Wijesinha explique à quel point l’étroite coordination entre le représentant permanent et le Secrétariat pour la Paix avec leur connaissance de première main du terrain s’avéra essentielle. Cette connaissance, associée à une bonne compréhension des motivations et des contradictions internes de l’adversaire ainsi que l’aptitude à percevoir les points d’intérêt communs avec la communauté des pays en développement a permis à l’équipe de répondre rapidement et de manière offensive à des attaques dénuées de tous fondements et d’étaler au grand jour la duplicité des occidentaux, les plaçant ainsi sur la défensive en fragilisant leur position.
En septembre 2011, une nouvelle tentative de placer le Sri Lanka à l’agenda fut le fait du Canada, agissant en lieu et place de Washington qui n’était pas à ce moment membre du Conseil des Droits de L’Homme. J’étais alors représentant permanent du Sri Lanka à Genève et me trouvai face à un ambassadeur US particulièrement furieux, Eileen Danahoe qui s’écria : « Nous vous aurons la prochaine fois ! ». Six mois plus tard, les US, à nouveau devenus membre, prirent l’initiative et deux résolutions suivirent en 2012 et 2013 entraînant la fameuse résolution 2015 adoptée sans vote suite à son soutien par le nouveau gouvernement pro-Washington à Colombo.
Avec cette dernière résolution qui constitue une réelle menace pour la souveraineté du Sri Lanka le livre de Rajiva Wijesinha arrive à point nommé. Image faussée de la réalité Tamoule – la tragédie du Sri Lanka : un volet essentiel de l’ouvrage de Rajiva Wijesinha consiste à analyser la définition persistante et irresponsable par les politiciens Sri Lankais des tamouls comme groupe homogène et non comme communauté hétérogène avec ses différences de classes, de castes et d’origines géographiques que reflète la diversité de ses forces sociales et politiques. L’ouvrage regorge d’exemples de la diversité des populations tamoules du Sri Lanka et livre un catalogue des abus perpétrés par le LTTE contre des tamouls qui deviennent ainsi les premières victimes de cette terreur.
En dépit des évidences, tous les protagonistes de la tragédie Sri Lankaise - Le LTTE, les gouvernements Sri Lankais successifs et les pouvoirs occidentaux- , ont tous souscrit à cette vision distordue de la réalité tamoule. Le récit de Rajiva Wijesinha montre à quel point cette façon de voir a servi à justifier les politiques des gouvernements successifs sous les présidences de J.R Jayewardene, Premadasa et CBK avec pour résultat la reconnaissance du LTTE comme seul interlocuteur représentatif du peuple Tamoul au détriment d’autres forces politiques et sociales qui auraient pu représenter une alternative démocratique. Premadasa avait même soutenu activement le LTTE contre d’autres forces tamoules qui s’étaient manifestées sur la scène politique dans la foulée des accords Indo-Lankan de 1987.
L’accord de cessez-le-feu de 2002 signé par le gouvernement de Ranil Wickermasinghe sous la présidence de CBK allait jusqu’à reconnaître le LTTE comme seul représentant des tamouls, empêchant ainsi les autres forces tamoules de se plaindre des abus du LTTE. Comme le gouvernement n’enregistrait pas ces plaintes non plus, il n’existe aucun relevé exhaustif des horreurs infligées par le LTTE aux populations qu’il était censé représenter.
A cette époque, des millions de roupies furent versées au LTTE par le canal de l’ONU et avec l’accord du gouvernement de Ranil Wickermasinghe. En dépit de multiples preuves de ce que le LTTE se réarmait et étendait ses opérations à d’autres parties du territoire, le gouvernement Wickermasinghe continua d’affirmer que les accords de cesser le feu étaient respectés.
CBK agissait de même. Elle se montrait prête à négocier avec le LTTE sur base de prétentions contestables en vue d’un gouvernement autonome auquel l’autorité accordée aurait octroyé des pouvoirs totalitaires. Elle signa alors les accords P-TOMS dont certaines clauses s’avérèrent anticonstitutionnelles après avis de la cour suprême. En privilégiant le LTTE, CBK négligeait de dialoguer avec les forces tamoules modérées avant qu’il ne soit trop tard. Avant qu’elle ne propose un compromis qui s’ouvre aux forces modérées, Neelan Tiruchelvam avait été assassinée et le LTTE avait étendu son emprise sur le nord du pays et ses politiciens. Pire encore, l’UNP brûlait littéralement ce document au siège du parlement.
En présentant les Tamouls comme un groupe homogène, nos politiques ont consciemment ou inconsciemment conféré une légitimité au LTTE en tant que seul représentant du peuple tamoul, légitimant ainsi ses exigences d’un état à part. L’œuvre de Rajiva Wijesinha aide à comprendre comment la propagation d’idées fausses a aidé à monter un dossier de R to P ou droit d’ingérence contre le Sri Lanka, livrant à Washington le précédent dont il avait besoin aux Nations-Unies pour légitimer une intervention controversée fondée sur ce troisième pilier du "Droit d’Ingérence".
Les références réitérées des gouvernements Sri Lankais successifs à l’existence d’une soi-disant diaspora tamoule, de manière positive ou négative d’ailleurs, n’ont fait que renforcer cette idée fausse. A moins que nous ne tirions un jour les leçons de l’histoire, nous resterons un peuple divisé.
A mes yeux, la perception erronée du peuple tamoul en tant que communauté homogène a été et continuera d’être l’obstacle majeur à l’établissement d’une paix durable et à la construction d’une identité Sri Lankaise commune qui soit basée sur la justice et l’égalité. La fiction que la source du conflit se trouve entre une majorité Sinhala et une minorité Tamoule peut convenir à des politiciens avides d’obtenir une parcelle de pouvoir au Sri Lanka, également à des puissances occidentales désireuses de pouvoir intervenir dans les affaires intérieures du pays mais cela ne sert absolument pas les intérêts du peuple Sri Lankais ni ses aspirations à une société où ils puisse décider de son destin.
Un défi pour nous réapproprier notre histoire : on n’insistera jamais assez sur l’absolue nécessité d’entretenir notre mémoire. Si nous ne le faisons pas, d’autres la réécriront pour nous. Le livre de Rajiva Wijesinha est un défi qu’il nous lance et une pièce maîtresse de notre histoire contemporaine, Une œuvre que chacun et tous doivent lire.
Référence du livre de Rajiva Wijesinh : S. Godage & Brothers (Pvt) Ltd, 661/665/675, P. de S. Kularatne Mawatha, Colombo, Sri Lanka, 2015, 279 pp. IBSN 978-955-30-6539-1.
Traduit de l’anglais par Oscar GROSJEAN pour Investig’Action
Source : Thupappi.wordpresse.com
Si cet article vous a intéressé, nous vous proposons de découvrir l’ouvrage de Tamara Kunanayakam : Quel développement ? Quelle coopération internationale ? publié par les Editions du CETIM.
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